L’éthique source de santé
« Donner du sens à la vie produit de la santé » (Jacques Besson, médecin addictologue, professeur et auteur).
La clé d’une approche holistique et globale
Notre santé repose sur des piliers complémentaires, qui composent entre eux un équilibre plus ou moins solide ou adaptable.
Partant de là, il paraît hasardeux de négliger ne serait-ce que l’un d’eux, sans risquer d’être bancal.
Parmi les éléments qui participent de cet équilibre, il en est un qui se trouve souvent relégué en arrière-plan, alors qu’il constitue la clé de voûte de l’hygiène de vie : l’éthique.
Selon sa définition académique, l’éthique est l’ensemble des principes moraux qui sont à la base de la conduite de quelqu’un.
L’éthique est un pilier de santé qu’il est très délicat d’aborder car il semble souvent trop personnel, trop subjectif et trop sensible. Mais en réalité, les autres facteurs le sont tout autant : que ce soit le régime alimentaire, l’activité physique ou le rythme de vie, un bon naturopathe vous recommandera toujours des recettes personnalisées, et il vous reviendra en plus de les adapter en fonction de vos sensations et du contexte que vous traversez… En bref, ce qui est bon pour vous à un moment donné, peut être radicalement différent de ce qui conviendrait à votre ami ou même à votre frère jumeau au même moment.
Pour le dire à la manière de Thierry C. (« influenceur en jus de légumes » dixit le journal Le Monde) : ça dépend.
Il ne s’agit donc pas ici d’indiquer quelle est la bonne éthique, il s’agit juste d’en avoir une.
Et contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce n’est plus si évident pour tout le monde. Parler d’éthique personnelle et de ligne de conduite c’est évoquer la colonne vertébrale d’un individu, c’est-à-dire ce qui fait qu’il se tient droit et qu’on peut voir clairement dans quelle direction il regarde.
Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : les autres ne sont pas pour autant des reptiliens…
L’éthique représente donc cette part de notre santé qui repose sur notre alignement intérieur.
Et aussi surprenant que ça puisse paraître, être cohérent avec soi-même est au moins aussi important que soigner son alimentation, bien dormir et faire du sport.
Plus encore, c’est parce que vous serez cohérent et aligné qu’il sera de plus en plus facile de lier tous les autres piliers ensemble dans un élan complet de vitalité. C’est ce que Jacques Besson, pour le citer encore, nomme la salutogénèse. A l’opposé, le vide existentiel débouchera plutôt sur l’addiction, la dépression ou l’agressivité.
Quand on intègre pourquoi on fait les choses, que ça nous semble juste de le faire, jusque dans nos tripes, alors ce n’est plus une contrainte, une nécessité liée à la survie, ou une norme à respecter, ça devient simplement une philosophie de vie joyeusement assumée.
Une forme de vie harmonieuse et inspirante
Sans chercher à être un modèle ou un saint, difficile d’ignorer que notre vie s’imprime et s’exprime autour de nous, et par conséquent influence ou inspire les autres.
Au sens de la médecine millénaire, prendre soin de sa santé et développer son hygiène de vie, c’est rechercher l’harmonie en toutes choses : pour soi et pour le reste de la création.
Cette quête d’harmonie est le fondement même de la naturopathie.
Nous pouvons y voir la base de la pensée écologique. En effet, si la nourriture est prélevée dignement, si la personne est bien traitée, et si ses déchets ne sont pas totalement viciés, alors l’individu a un impact raisonné sur son environnement. Si, à l’inverse, il fabrique et ingère des aliments toxiques, s’expose à la violence et propage la haine, et in fine rejette des déchets imprégnés de tous ces maux, alors il devient un élément nuisible pour le reste du vivant.
On touche ici du doigt la notion de permaculture, agricole et humaine à la fois, dont les principes constituent en eux-mêmes une éthique de vie (par exemple : faire avec la nature plutôt que contre elle).
D’autres préféreront une expression plus spirituelle de cette pensée, et s’accorderont sur le fait que prendre soin de l’intégrité d’un individu (soi), c’est prendre soin du Tout, car nous sommes tous reliés (Un). Tandis que négliger sa santé, ou au contraire la surprotéger, ou encore agir comme une girouette au gré du vent et sans conscience, c’est porter atteinte à l’intégrité du Tout.
Les bases d’une vie harmonieuse sont plutôt bien connues, depuis longtemps. La plupart d’entre nous les connaissons instinctivement.
Pourtant, elles sont de plus en plus difficiles à mettre en œuvre, à mesure que la civilisation « progresse ».
Vivre sainement perd parfois de son intérêt immédiat face aux promesses du monde moderne et à la frénésie du progrès technique et matérialiste. La quête éperdue de ce soi-disant progrès incarne souvent une fuite en avant, un reniement de ce qui est, et de ce qui nous rend vivant, face à l’illusion que l’herbe serait plus verte ailleurs (si on la fabriquait en laboratoire peut-être !).
C’est un des plus grands défis auxquels nous faisons face. L’éthique se trouve régulièrement sacrifiée sur l’autel de la modernité et d’une certaine « ouverture d’esprit », insinuant qu’il faut vivre avec son temps et que refuser le progrès serait contraire à l’ordre des choses. D’accord pour le progrès moral, mais le reste, vraiment ?
Les lois naturelles sont immuables et le progrès humain n’a de sens que lorsqu’il s’inspire de ces lois pour se déployer. Nous sommes capables de grandes et belles choses, et nous ferons encore de sublimes découvertes, mais le progrès n’est pas une fin en soi.
L’humilité sur l’état réel de nos connaissances devrait nous faire admettre que nous jouons chaque jour aux apprentis sorciers.
L’arrogance de ceux qui croient pouvoir faire mieux que la nature, de ceux qui croient avoir tout compris, et de ceux qui se croient hors de portée des lois naturelles, ne peut aboutir qu’à des décisions néfastes, à plus ou ou moins long terme.
Ecouter notre moteur, et retirer les filtres encrassés
Développer un sens de l’éthique nécessite de confronter nos choix à ce qui sonne juste, à l’intérieur comme à l’extérieur. L’éthique nous questionne sur ce qui va ou non dans le sens de la Vie : est-ce vertueux ? est-ce beau ? est-ce vrai ?
Faites émerger le souvenir d’une situation où vous pouvez répondre « oui » à ces trois questions et ressentez la joie que cela procure.
Ensuite, remémorez-vous le malaise qui a pu s’installer à d’autres moments, face à une violence, une injustice, ou simplement quelque chose de laid.
Une simple évocation permet de comprendre l’endroit où les perceptions se jouent, comment ça se manifeste chez vous. Ainsi, vous pourrez, à l’avenir, observer plus finement vos sensations et ressentis intérieurs pour mieux comprendre où vous vous situez par rapport à une situation donnée.
Vérifier les filtres régulièrement !
Il ne faut pas confondre ces sensations avec celles qui sont liées à nos blessures, nos peurs et nos psychoses personnelles. Celles-ci peuvent temporairement brouiller nos repères (une tendance à voir du laid partout, ou bien à nous sentir mal considéré, ou persécuté, etc.) et la dissonance intérieure qui s’exprime alors tient plus de la panique mentale que de l’alerte éthique.
Pour profiter de ce qui est beau, bon et juste, encore faut-il être en mesure de le reconnaître. Et c’est là que l’ancrage aux éléments naturels, aux réalités concrètes, et aux soutiens affectifs fiables prend toute son importance.
Comment chouchouter notre intériorité pour ménager notre énergie vitale ?
- En ne participant pas à ce qui vibre mal, ce qui nous tire vers le bas ou heurte notre conscience. Ne pas participer, ce n’est pas forcément s’opposer, mais c’est au moins ne pas permettre à quelque chose de se réaliser par notre concours (le « non faire »).
- Pour autant, je ne crois pas qu’il faille non plus les ignorer. Parfois, l’éthique c’est justement accepter de regarder en face ce qui est inconfortable pour nous, pour ne pas laisser faire quelque chose qui serait bien plus qu’inconfortable pour d’autres. Faire comme si le crime n’avait pas lieu, n’empêche malheureusement pas le crime d’avoir lieu.
- Evidemment, dans notre monde de dualité, il nous est surtout conseillé d’alimenter le côté lumineux de l’histoire : identifier ce qui vous semble généreux, enthousiasmant, émancipateur, ou bienveillant, et nourrissez-le. Diffuser de belles énergies, ou les aider à se déployer, est une véritable source de paix intérieure et donc de régénération.
Peut-on considérer que l’argent lui-même est un vecteur d’énergie et d’expression de notre éthique ?
Si oui, pensez à qui profite cette énergie dépensée lors d’un échange monétaire. Faire le choix d’acheter des aliments sains, par exemple, c’est un cadeau pour l’organisme, mais c’est aussi la matérialisation d’une intention, celle de soutenir tel producteur, de favoriser le développement de tel type de commerce, etc.
J’ai tendance à considérer que nous votons bien plus avec notre casquette de consommateur qu’avec notre carte d’électeur !
Mais la vie n’est pas un long fleuve tranquille, et, vous le savez sûrement déjà par expérience, être fidèle à son éthique personnelle peut s’avérer risqué.
Imaginez une société où les valeurs seraient inversées, par exemple une société où le juste serait dénigré, le beau transgressé, le confiant maltraité, le corrompu toléré, et où le ciel ressemblerait parfois à une grille de sudoku.
Le genre de société où il serait suspect de prôner des méthodes de santé naturelles et accessibles à tous, de cultiver la paix, et de réfléchir par soi-même.
Dans cette de société, on pourrait même essayer de vous convaincre qu’il faut s’arrêter de vivre pour ne pas risquer de mourir.
Heureusement, nous n’en sommes pas là, c’est juste une hypothèse de travail 😉
Manifester une cohérence intérieure, c’est manifester une forme de liberté. Or la liberté des uns n’est pas toujours du goût des autres. Et nous n’échappons pas au travail de sape qui cherche à noyer notre bon sens dans un mélange d’absurdités et de communications intempestives.
- Savoir s’extraire du tumulte, des informations débordantes, et des divertissements qui dévorent notre attention, c’est une façon de se reconnecter à ce qui est bon pour soi.
J’ajouterais, si possible, les pieds nus dans l’herbe, la tête dans les étoiles, et bercé par une douce musique et la certitude que nous sommes aimés pour ce que nous sommes (du fait de notre éthique justement), ça aide aussi. - S’il faut parfois ramer à contre-courant, alors il convient de muscler notre esprit comme notre corps pour contrer les remous. Cultivons notre intelligence naturelle (versus artificielle) et soyons plus smart que nos téléphones…
Eduquez-vous, lisez, discutez, renforcez vos connaissances, pour comprendre les règles du jeu et vous positionner en toute conscience. - Rechercher ce qui nous procure de la joie, de la douceur et de la paix, reste le meilleur remède jamais inventé.
- Si vous peinez à les trouver en vous-même, entourez-vous de personnes inspirantes.
“Les voies ascendantes sont joyeuses par essence et ardues par nécessité” (P. Franceschi, Éthique du samouraï moderne)
Ce chemin n’est pas accessible par la seule force de la volonté, il nécessite d’avoir la foi, même au sens laïc du terme : avoir confiance en quelque chose qui doit être ou qui doit advenir, sans qu’aucun élément tangible ne puisse nous le garantir a priori. Ni scientifique, ni logique, mais une des plus belles choses au monde car c’est elle qui nous rend inventifs et constructifs.
Votre éthique personnelle est en fait l’expression de votre amour pour la Vie. Or l’amour, il guérit tout.
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* Je précise qu’être naturopathe n’empêche pas d’être parfois incohérent, car c’est un chemin et non pas un aboutissement. Et nous sommes bien placés pour savoir que c’est un constant travail d’équilibriste !